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Le tissage Delahousse
Après le passage à niveau et l'école
Saint-Joseph devenue Saint-François, nous voici au niveau de la résidence
Maurice Schuman, où se trouvait le tissage Delahousse.
A l'emplacement que tout le monde connaît aujourd'hui sous le nom
de Résidence Maurice Schuman se trouvait autrefois un tissage de
toile exploité par Lucien Delahousse. Peu de détails sont
parvenus jusqu'à nous quant à la construction de cette entreprise.
Il semblerait qu'elle fut bâtie vers 1890-95. En 1917, une bombe tomba
sur le tissage. Dans son "Journal d'un occupé roncquois ",
Félix Decottignies nous raconte: " Vendredi 28 septembre 1917:
8h30 du soir. Des avions alliés survolent Roncq. Une bombe est jetée
sur les bâtiments formant l'entrée du tissage de M. Lucien
Delahousse rue de Lille où sont logés les civils volontaires
de Gand occupés aux travaux allemands. L'explosion a été
terrible. L'entrée principale, les bureaux se trouvant à droite
et à gauche de cette entrée sont effondrés. Sous la
grande porte, la bombe a creusé une excavation qui a réuni
les 2 caves se trouvant au nord et au sud de cette entrée. La façade
n'existe plus, tout a été démoli et pour ainsi dire
pulvérisé. Les débris de l'explosion ont été
lancés sur les habitations voisines. Elles sont criblées de
planches, vitres, pannes, carreaux, grés, pierres, briques. Les toits
sont démolis, les vérandas sont tordues et dans la rue, sur
un espace de 100m de l'usine, jonchent les débris des matériaux
lancés de tous côtés. Combien y a-t-il de victimes?
Sur le moment on ne peut savoir. Ceux qui approchaient du bâtiment
effondré voyaient fuir, affolés, les ouvriers civils, à
peine vêtus, porteurs de leurs effets, sacs, boîtes, valises.
Dans l'obscurité, ne trouvant plus pied ferme sous la porte d'entrée,
ils étaient précipités dans le trou béant et
en sortaient comme ils pouvaient en poussant des exclamations en flamand
que nous ne comprenions pas. " Qu'étaient devenus la sentinelle
de garde à l'entrée et les soldats qui occupaient les bâtiments
atteints par l'explosion? " Les ordres sévères criés
en allemand par les officiers, de faire circuler ceux qui se hasardaient
d'approcher du bâtiment ne nous permettaient pas de voir des victimes
ou de les compter. La gendarmerie, les policemans forçaient les curieux
à rentrer chez eux et ce n'est que le lendemain que nous pûmes
juger de l'importance des dégâts et connaître le nombre
des blessés ou tués. Les branchements de gaz et d'eau installés
dans lesdits bâtiments avaient été complètement
détruits par l'explosion. Pour éviter l'incendie et des pertes
de gaz, la pression de nuit pour l'éclairage fut nulle pour toute
la ville. " Samedi 29 septembre 1917: " Samedi matin, à
la première heure, des équipes de terrassiers, ouvriers gaziers
et du service des eaux étaient commandés pour les travaux
de déblaiement. " On commença par découvrir des
débris de corps humains. Un tronc en face de la porte de l'atelier
Hector Cokèle. Une jambe avec soulier dans le jardin Desprez. Dans
le jardin Emile Parent une autre jambe, tout le cuir chevelu de tête
d'homme, des morceaux de chair. En face de la porte Maertens un avant-bras
et une main d'homme, le derrière de la tête d'un soldat sans
doute, une troisième jambe et des débris de corps sanguinolants.
Des vêtements en lambeaux maculés de sang étaient accrochés
aux fils téléphoniques et sur le toit des viscères!
L'entrée de l'usine Delahousse après le bombardement. La photo date du samedi 29 septembre 1917 au matin
Voici la suite des dégâts
provoqués par la bombe tombée sur le tissage Delahousse en
1917, tels qu'ils sont racontés par Félix Decottignies dans
son " Journal d'un occupé roncquois ". " Les blessés
civils (une dizaine) avaient été transportés et soignés
dans l'estaminet du sabotier Vanderkerckhove et les soldats admis à
l'Hospice de Roncq servant actuellement d'hôpital. Une des femmes
qui accompagnaient les civils fut grièvement blessée et transportée
également à l'Hospice. On a dit qu'elle avait succombé
à ses blessures dans l'après-midi. La Commandanture n'a pas
fait connaître le nombre d'absents après l'explosion. Ce qui
fait supposer que l'on peut compter les victimes au nombre de 4, c'est le
nombre de jambes trouvées. Les 3 jambes ne portaient pas le même
modèle de chaussures! Toute la journée, des soldats photographes
ont pris des vues du lieu de la catastrophe, et ça n'a été
qu'un défilé continuel de Roncquois qui sont venus voir les
dégâts produits par le jet de cette bombe. Emile Deltour Fils
a été réquisitionné pour fabriquer deux caisses-cercueils
destinées à contenir ces débris qui furent déposés
au cimetière dans le terrain réservé aux soldats allemands.
Les tristes souvenirs et les impressions laissés par le passage des
aéros alliés qui viennent nous saluer ne nous font pas désirer
d'avoir souvent leur visite ".
Vingt ans plus tard, M. Eugène Henri, directeur de l'école
St-Joseph qui avait été témoin de cet événement
le racontait à ces élèves.
Après la guerre, l'usine fut rachetée par M. Stock qui installa
un tissage de jute, fabrication de sacs servant à transporter charbon,
pommes de terre, etc.
Avec l'essor du plastique, fabrication des sacs de jute périclita
et les établissements Sylvallac y installèrent une entreprise
de transformation du plastique bn qui cessa son activité à
la fin du 20ème siècle.
De l'autre côté, au coin de rue Jeanne d'Arc et de la rue de
Lille, il y a, à gauche, une boucherie dont on retrouve la trace
en 1880. Il y avait aussi une tuerie d'animaux donnant rue Jeanne d'Arc.
Jacqueline et Julien avec l'aimable autorisation de Nord
Eclair moyens techniques CRRAI http://www.crrai.com tél:03.20.94.12.32 |